Dors, mon petit prince dors. [pv Shad]

Le coup de Shad lui fit soudainement perdre conscience. Denzel plongea la tête dans la boue pour ne pas se relever, inanimé. Oh, il n’allait pas le rester longtemps, non. Déjà, lorsque le majordome appela la calèche, il sentit quelque chose de lourd sur son visage sans trop parvenir à deviner de quoi il s’agissait. Son esprit, lui, était particulièrement embrouillé et il s’avérait incapable de retrouver tous ses sens d’un seul coup. Crétin de Shad : qui lui aurait dit qu’il ne fallait surtout pas qu’il vienne le chercher ? Après avoir suffisamment entendu le rythme monotone des sabots des chevaux sur le sol, le jeune garçon s’évanouit complètement. Il ne put ainsi pas constater qu’il venait d’entrer dans le château ou encore entendre les ordres que venaient de donner Shad à ses geôliers.

Denzel se réveilla quelques heures plus tard, dans le noir complet ; non, pas si obscur que cela, en fait. Des lumières brillaient, à l’extérieur. Il comprit tout de suite qu’il était enfermé, ayant quelque peu l’habitude de ce genre de décor. En effet, lorsqu’il avait emmerdé l’autre clown aux cheveux bleus, avec Milo – ô doux souvenir – on les avait foutu deux mois en prison. C’était dur mais au moins, même s’ils avaient été séparés, on ne les avait torturés. Denzel savait qu’il ne résisterait pas à la moindre torture. Il était certes le plus intelligent, mais le moins fort des deux et son corps avait tendance à être plus fragile que celui de son frère. La dernière fois qu’un mec plus balaise que lui l’avait frappé, il était allé jusqu’à le supplier pour qu’il arrête en lui avouant tout par la même occasion, c’est dire. Il n’était pas vraiment fier d’appartenir au seigneur Paulin, savait tout de même qu’il avait évité la peine capitale grâce à son arrivée, cependant, n’aimait pas le royaume voisin ni ceux avec qui il travaillait. Et là…il était dans la merde.

Le garçon avait toujours un mal de crâne des plus effroyables. Il tenta de se frotter les yeux mais s’aperçut que ses poignets étaient retenus par de lourdes chaines de fer. Qu’allait-il bien pouvoir subir dans les heures qui allaient suivre ? Il avait déjà faim, en tout cas. Il avait dû dormir plusieurs heures et son estomac faisait un bruit infernal. Il se racla la gorge et appela un garde : il voulait à manger et à boire ! Quelqu’un s’approcha de la cellule et lui dit que « Monsieur von Kaizel » avait décrété qu’il n’y aurait pas le droit avant trois jours et que lui « pauvre loque », devait se la ferme s’il ne voulait pas d’un coup dans le ventre qui lui ferait cracher les boyaux. Denzel grimaça et se déplaça lentement vers un mur de la cellule : ce n’était pas comme la dernière fois, il n’y resterait pas seulement deux mois. Ce n’était plus un jeu. Shad n’était pas un compagnon, encore moins un souffre-douleur et ils l’avaient énervé. Encore pire, ils avaient cherché à le tuer et réussi à l’atteindre. Nul doute qu’il serait passablement énervé et aurait envie de se venger.

Que dirait donc Perceval, lorsqu’il apprendrait cela ? Ferait-il lui-même un déplacement jusqu’au château pour le tuer avant qu’il avoue des choses à propos du seigneur ? Milo l’avait-il déjà prévenu ou avait-il été plus fin et cherchait à se débrouiller par d’autres moyens ? Denzel, dans son malheur, avait tout de même un minima de chance : il ne connaissait pas tous les détails de l’affaire, sans quoi l’on aurait pu dire qu’il eût été encore plus coupable, dans cette affaire. Même lui, à son niveau, ne savait pas clairement quel était le but de Paulin ou Perceval, ni pourquoi ils faisaient exploser des bombes ? Etait-ce pour discréditer la résistance et apporter de la crédibilité à la royauté ou tout simplement pour arriver en force comme une troisième option, avant d’envahir le pays ? Il frissonna. Des pas résonnaient dans les cachots, il pouvait avoir peur. Alors, il pensa, pensa à un air de musique que sa mère leur chantait en guise de berceuse et qui le rassurait.

« Petit prince est au lit ; Dans son nid l'oiseau s'est blotti ; Et la rose et le souci ; Là-bas vont dormir aussi ; La lune qui brille aux cieux ; Voit si tu fermes les yeux ; La brise chante au dehors… »

Sa voix était frêle et tremblante. Il avait peur.

Invité

En quelques heures il avait réussi à se faire détester par les domestiques les plus jeunes et inexpérimentés du château. Les plus âgés ou encore ceux habitués à Shad savaient que cette mauvaise humeur serait passagère et disparaitra le jour où les pipelettes arrêteront de jacasser sur la joue rouge du majordome et lorsque cette même marque aurait disparu, après un impitoyable passage au bleu. En effet il semblerait – à vue de nez- que la peau pâle du jeune homme allait connaître une petite tâche bleue ou verte. C’était une première comme c’était une première qu’il rate le réveil ET le déjeuner des Princes. Il n’était donc pas étonnant qu’il hurle au moindre faux pas de ses subordonnés… Il avait besoin de se défouler et l’inconscient qui l’avait mis dans cet état était encore évanoui. Il aurait pu le réveiller à coup de seau d’eau glacé mais il avait préféré accourir vainement auprès d’Armand et Louis, déçu, il se rendit dans sa chambre pour se changer. En effet il ne manquerait plus que tout le monde jase sur la boue qui le maccule ou encore la légère poussière qui s’était installée sur lui, sûrement la poussière des rues du royaume.

Enfin la libération des ces jeunes arrivèrent avec la nouvelle donnée à Shad par l’un des gardes : Le prisonnier s’était réveillé. Un sourire sadique et malsain s’étira sur ses lèvres et il abandonna toutes les tâches, donnant l’ordre de tout faire dans la perfection avec un ton doux qui jurait avec le ton colérique qu’il employait depuis des heures. Apparemment et à la surprise de tous, la gorge de Shad n’était pas si délicate que ca parce qu’il avait crié assez longtemps sans rouiller ou ravaler outrageusement sa salive pour « humidifier » une gorge irritée. Cet homme n’était décidément pas humain ou alors il avait reçu un don… celui d’être résistant, quel que soit l’épreuve ou les actes qu’il commettait.

Il se dirigea donc vers les cachots, claquant de ses chaussures vernies et brillantes le sol, réajustant ses gants d’ue blancheur immaculée et lissant à nouveau son costume. Il était maniaque et il avait ce besoin d’être propre où qu’il aille. Que se soit les cachots ou les appartements des Princes, il se devait d’être présentable. Un tic, une habitude, une manie, une folie… nommez comme vous désirez ce besoin qui vous semble ridicule mais qui est nécessaire pour Shad, presque une question de vie ou de mort.

Soudain une petite mélodie se fit entendre. Loin de s’arrêter, il s’avança, se délectant déjà de la peur qu’il causait à son compagnon de malheur rien qu’avec le bruit de ses pas.
Il ouvrit la lourde porte qui grinçait et intima aux gardes de rester dehors et disant clairement qu’il ne voulait être qu’avec le jeune homme dans la pièce. Une troisième personne serait gênant et trop bavarde… Il ne voulait pas que d’horribles rumeurs se répandent avec une base solide. En effet il était plus facile de briser des rumeurs sans fondement que les rumeurs avec des fondements.

- Alors… Denzel, n’est-ce-pas petit clown hideux ?

Il l’avait dit avec un sourire et se pencha sur les lourdes chaînes pour s’assurer de leur solidité et s’écarta aussitôt pour jeter un regard circulaire dans la pièce. Cela faisait si longtemps qu’il ne s’y était pas rendu en acteur… Jusqu’à maintenant, c’était plus en spectateur ou assistant à ses Princes qu’il s’y rendait or aujourd’hui… Il allait torturer. Un certain plaisir gonfla dans sa poitrine et ce sentiment s’amplifia au fur et à mesure qu’il détaillait la pièce.

Il retourna auprès des gardes et leur demanda un bon repas pour deux personnes ainsi que le nécessaire pour allumer la petite cheminée qui se trouvait dans la pièce. Sa demande connue une réponse expresse et on lui amena rapidement tout ce qu’il avait demandé. Il remercia et referma définitivement la porte.

- Il fait froid n’est-ce-pas ? L’hiver n’est pas clément avec nous malheureusement.

A ces mots il s’approcha de la cheminée bâtie dans la pierre et l’alluma à coup de bois et de torches enflammés. Rapidement, un bon feu ardent crépitait, se reflétant dans les pupilles du ténébreux dont le regard était assez terrifiant à cet instant.

Et les pas continuaient à résonner dans le couloir, tandis que Denzel se recroquevillait sur lui-même. Il allait mourir, c'était cela ? Alors autant le faire dignement ; il espérait qu'il pourrait au moins une fois revoir Milo, pendant ce temps-là. Enfin, l'être qu'il avait tenté d'attaquer avec son frère venait arriver. Malgré l'atmosphère sombre qui régnait dans la cellule, il parvint tout de même à distinguer la marque à sa joue. Était-ce véritablement lui qui lui avait faite ou Milo, pendant qu'ils se battaient ? Toujours est-il que Shad ne semblait pas de très bonne humeur, et que Denzel s'inquiétait sur son sort. Il avait arrêté de chanter, ne tenant pas plus que cela à ce que le majordome le houspille sur le fait qu'il tremblait comme une fillette. Même s'il était emprisonné et que ses deux mains étaient retenues par du fer, il avait gardé sa fierté. De même, il ne réagit absolument pas lorsque Shad le traita de « petit clown grincheux ». Il se contenta d'un grognement, faisant crisser ses ongles sur le sol. Il n'aimait pas le fait que celui-ci ait fermé la porte derrière lui, lui enlevant la possibilité de hurler à l'aide, et ainsi de rameuter un quelconque garde allié à la résistance – du moins si cette espèce existait.

De un, il n'était pas un clown. Il s'habillait juste ainsi afin d'exorciser ce fantôme du passé. De deux, il n'était hideux, sous cette couche de maquillage. Denzel n'ajouta rien, restant prostré au fond de la cellule, sentant le mur contre son dos et appréhendant déjà de la suite. Mais Shad arriva et se pencha sur lui, vérifiant les fers, ce qui occasionnant un violent frisson. Ne pas avoir peur, ne pas montrer sa peur. C'était comme ces chiens qui attaquaient dès qu'ils ressentaient la peur de leur victime. Denzel ne devait pas faire penser à Shad qu'il était plus fort que lui, ou alors, celui-ci le briserait d'un coup sec.

Le majordome alluma la cheminée ; Denzel lança un nouveau regard anxieux vers l'antre. Il voulait lui commander à manger ou était-ce un piège ? Il savait qu'en prison, l'on n'avait guère l'habitude de nourrir convenablement les prisonniers, alors, la seconde option était sans nul doute la bonne. Bien évidemment qu'il faisait froid : ils étaient dans les cachots, et les Princes n'étaient pas reconnus pour fournir le chauffage à ceux qu'ils avaient emprisonnés. Denzel n'osa pas regarder Shad dans les yeux : il avait cru apercevoir un éclat rougeâtre lié au chauffage, et se confronter directement à ce démon ne lui plaisait guère.

« Il n'y a pas que l'hiver, qui n'est clément avec nous, monsieur Von Kaizel. Que comptez donc vous faire de moi ? Je crains, malheureusement, que ce dîner ne soit qu'une politesse pour le condamné et le feu non destiné à me réchauffer. »

Denzel avait toujours été un diplomate. Entre son frère et lui, l'on pouvait considérer que la force était plutôt détenue par l'un, et que lui, Denzel Johnson savait parler. Il avait ce don rare qui était de parler assez bien dans les situations les plus extrêmes. Il avait peur, il était même terrifié, cependant, il s'était longuement entraîné dans l'autre royaume afin de ne faire flancher sa voix à aucun moment. Les négociations ne faisaient que commencer, et allaient surtout dépendre de l'autre. Son but ? Éviter toute violence possible, il ne tenait pas à avoir mal.

« Alors, Monsieur ? Qu'avez-vous à me demander ? Oh, cette marque, est-ce de ma faute ? Êtes-vous en colère ? »

Par contre, seul défaut : il avait toujours aimé narguer son adversaire dans le but de trouver son point faible. Shad n'apprécierait sans doute pas beaucoup cela, surtout que la marque venait faire contraste sur son visage si blanc. Où était Milo ? Et si Shad était également parti à sa recherche ? L'avait-il trouvé ? Non, il ne pensait pas que ce dernier ait été capturé, auquel cas il l'aurait senti : c'était cela, d'être jumeaux. Un furieux pressentiment lui aurait alors bourinné la poitrine et il aurait crié le nom de son frère.

« Si nous devons manger d'égal et à égal, pourquoi ne pas m'enlever ces fers ? »

Invité

En entendant le mot « cellule » ou encore « cachot », on imaginera naturellement une pièce froide et grise aux dimensions réduites. Effectivement c’est le cas pour beaucoup des cellules de ces cachots sauf pour quelques unes qui étaient assez meublées, c’était tout simplement ces salles de tortures tant redoutées.
Il y avait donc cette cheminée mais vous vous doutez bien qu’elle servait sûrement à autre chose que réchauffer les habitants de cette pièce assez large – en plus, ces salles ne sont pas exigües en dimension- qui se résumaient très souvent à de simples gardes et criminels et sincèrement, qui accepteraient de payer du bois ou du charbon pour allumer un peu de feu à ces hommes-là ? Pas grand monde, c’était certain.

D’ailleurs le petit homme enchaîné s’était avéré un tantinet intelligent en comprenant que Shad n’avait pas allumer ce feu juste pour « faire jolie » ou encore « réchauffer »… oh que non ! Il avait d’autres projets avec ce feu où il laissa un tisonnier. En tout cas il semblait être plus un « négociant » qu’un « dur à cuir » qui est prêt à se faire taper dessus. Très bien, c’était aux goûts de Shad car le majordome allait torturer certes mais sûrement pas à coup de poing toute la séance. Peut-être de temps à autres mais sûrement pas uniquement ses poings, il ne manquerait plus que des marques rouges sur l’ossature de ses mains ! Il était un gentleman et il tortura en gentleman de temps en temps, c’est-à-dire plus douloureuse sans épuisement physique pour le brun.

Son sourire devint plus amer lorsque Denzel se moqua « innocemment » de lui avec cette magnifique trace rouge sur sa joue pâle. Son regard s’assombrit et s’il le pouvait, il trancherait avec cet inconscient. Malheureusement ses yeux n’avaient pas ce pouvoir, heureusement des outils étaient là pour compenser la faiblesse des humains et leurs désirs les plus sadiques et les plus sanglants.
Le petit clown continua son manège et demanda courtoisement si le majordome ne pouvait pas enlever ces chaînes pour qu’ils puissent manger d’égal à égal. Shad eut un rictus étrange et il s’approcha doucement, comme un serpent, de sa proie si faible à cet instant.

- D’égal à égal ? Tu es un criminel, la cause est la suivante : Tu as tenté de tuer un membre du Royaume.
Enfin… même si je voulais te délivrer, j’ai assez vu et ressenti pour savoir que tu te défends beaucoup trop bien pour un clown.

Sans vouloir trop se vanter, Shad se savait un combattant hors pair. Jusqu’à maintenant, on l’avait éduqué dans le but ultime d’atteindre la perfection, que se soit physiquement qu’intellectuellement. Il ne fallait pas croire que servir du thé l’avait émoussé, au contraire il continue à s’entraîner sans relâche et c’est lui-même qui enseigne quelques disciplines à ses princes. Il se connait dans plusieurs domaines, ce qui peut étonner plus d’un, effrayer un autre et rendre jaloux certains. C’est peut-être de là que s’on venue les rumeurs comme quoi il n’était pas humain… Stupide rumeur ! S’il n’était pas humain, il était quoi alors ? Un démon ? Pourquoi pas, en tout cas à cette heure-là il allait revêtir ce manteau démoniaque et prendre plaisir à meurtrir la chair du clown.

- Passons… J’aurais des questions à te poser mais je sais que tu ne répondras pas dans l’immédiat ou que tu mentiras. De plus je dois laver un affront que tu m’as fait. Ainsi, laisse moi te marquer petit clown pour que ce sourire s’efface dès le moment où tu penses à moi, que je m’insinue dans ton sommeil le plus profond pour transformer ton rêve en cauchemar et enfin que tu deviennes un chien fidèle.

Un beau discours qui prévoyait le pire. Bref de jolies paroles sans vraiment demander ce qu’il voulait.

- Mais avant… Laisse-moi te faire voir se qu’il en coût d’insulter nos princes et ce n’est qu’après… Si tu es encore en vie évidemment… Que je m’attaquerais aux véritables questions.

A ces mots, il démarra par les apéritifs c’est-à-dire une droite sur le visage, une gauche sur l’estomac et enfin un coup de pied dans les côtes. Tout ceci avec la force d’un jeune adulte éclatant de santé et évacuant toute sa haine et sa colère.

Il n’en avait pas fini.

- Ainsi mes Princes sont des lâches ? Vraiment ?

Il continue donc à redire toutes les insultes de Denzel et Milo tout à l’heure tout en tapant, toujours plus fort, ignorant la souffrance de l’autre.
Finalement il s’arrêta : Il ne voulait pas tuer non plus aussi vite le jeune homme. Il se dirigeait vers la table où était disposée différents mets, prit une bouteille de vin et l’approcha de la bouche du jeune homme pour la faire boire. Notons que la lèvre s’est éclatée sur les coins et le sang coulait à petits flots. Autant dire qu’un breuvage aussi délicieux deviendrait dans cette situation un supplice.

[color=darkred][b]- Ce n’est là qu’un début, petit clown.

hs: Mon premier rp avec torture.... .___. Je n'assure pas. T.T /va se cacher/

Shad von Kaizel. Un incommensurable crétin amoureux de deux gosses tout aussi crétins que lui. Il aurait dû le savoir plus tôt, il sait également que se répéter en boucle que lui et Milo n'auraient pas dû le choisir comme cible ne sert strictement à rien. Ou plutôt, c'était strictement inutile, mais cela, tous deux le savaient parfaitement depuis le tout début. Denzel grimaça. Il sentait que cette affaire allait mal tourner, très mal tourner. D'abord le feu, ensuite le repas apporté ; en voyant les yeux de Shad, ce seul détail suffisait à dire qu'il ne sortirait pas de cet endroit indemne. Il était qualifié de criminel ? Il n'avait tué personne, pour le moment, mais Denzel n'osa pas le faire remarquer au grand homme. Il le dirait peut-être plus tard, lorsqu'il supplierait, en larme, Shad. Et une fois encore, cet homme l'avait traité de clown. Il avait compris son point faible, le fait que chaque fois qu'il l'appelle de cet manière, le jeune garçon se rappelait inévitablement son passé et que cela lui faisait vraiment...mal. D'ailleurs, personne ne l'avait démaquillé. Sa figure devait être dans un drôle d'état, même s'il ne disposait de miroir pour le constater : un mélange de boue et de maquillage entrelacés, de larmes et de sentiments se mélangeant tour à tour, pensées pour Milo, pour Milo, pour sa survie.

Quelqu'un comme Milo, d'ailleurs, à la suite de ses paroles, lui aurait adressé un de ces gestes de la main si élégants. Pas lui. Il se contenta de rester muet, pour l'instant. Économiser les glucides valait mieux pour sa personne, pour l'instant, surtout s'il était condamné à mourir de faim les prochains jours. Oui, il avait bien compris. Cette cicatrice qu'il avait infligé à Shad, il allait payer pour le fait e lui avoir fait subir. Il était vrai qu'elle contrastait horriblement avec son teint parfaitement blanc. Il ne connaissait pas du tout le majordome, mais si celui-ci était un peu reconnu dans le château, il ne doutait pas qu'à cet instant, des rumeurs devaient circuler quant à l'origine de cette fine marque, qui, s'il avait un peu de chance, ne resterait pas longtemps sur cette joue.

Le premier coup vint avec une brutalité immense. Sous le choc, Denzel cracha, puis, sous la puissance de la frappe de Shad, s'écroula au fond du cachot, incapable de se relever. Il savait que ce n'était pas fini. Il craignait de comprendre la suite, cette punition, sa punition pour avoir insulté les icônes du royaume. Profitant du court répit qui lui était alloué, Denzel cracha à nouveau sur le sol, débarrassant sa salive du goût de sang récurrent qui lui remontait à la bouche. Et cela recommença, soudainement. Denzel n'eut pas le temps de parler, de crier, déjà, il subissait une avalanche de coup tous plus violents les uns que les autres. Au bord de l'évanouissement, il entendait toujours les insultes qu'il avait pu proféré à l'égard des Princes. Non, il ne deviendrait pas un chien, il était libre, entièrement libre, libre !

Et puis, les coups s'étaient totalement arrêtés, Denzel, dans un état à demi conscient, avait tenté de respirer un peu. Difficilement, il avait l'impression que sa lèvre était éclatée en mille morceau, que son monde n'était plus que douleur et qu'il serait désormais incapable de prononcer ne serait-ce qu'un seul mot.

« Ha.. »

Non, sa voix était complètement rauque, il y voyait à moitié trouble. Ses mains essayaient désespérément de chercher le sol à tâtons, afin de s'éloigner du monstre qui lui faisait face. Par pitié, plus jamais cela, même pas une seule seconde, un seul instant. Juste vivre, être libre, vivre avec son frère. Mais le cauchemar n'était pas fini, au contraire, il semblait que Shad von Kaizel avait prévu nombre de choses pour sa personne. Il ramena la bouteille prévue normalement pour dîner sympathiquement entre allié et la mit à sa bouche. Tout aurait pu bien se passer, Denzel étant habitué à boire de l'alcool, cependant, sa lèvre était blessée, sa bouche pleine de sang et entaillée, il se produisait un phénomène étrange à l'intérieur de lui-même. Ce fut comme si le majordome lui avait mis le feu entièrement. Des larmes commencèrent à couler sur ses joues, il cria. Cette fois-ci, du son sortit de sa bouche, et il essaya de recracher le liquide que lui avait versé Shad. Impossible, cela lui faisait toujours de plus en plus mal.

« Pi...pitié ! »

Ce « pitié », il le hurla. Peut-être de la manière la plus forte possible pour être sûr et certain que Shad l'entende correctement. Maintenant, il fallait qu'il crie qu'il était désolé d'avoir insulté les princes, qu'il dise que ce n'était pas sa faute, mais celle de quelqu'un qui ne nommerait pas. Merde, comment allait-il pouvoir faire ? S'il prononçait le nom de Paulin dans les cachots, il pouvait être sûr que quelqu'un l'assassinerait une fois sorti de prison – s'il en sortait un jour, bien entendu.

« Pitié... » sa voix était devenue faible, il avait mal, était en feu, ses membres ne pouvaient plus bouger, il avait l'impression qu'il allait mourir. « Je m'excuse pour eux, pour vos princes ! Lorsque je suis avec Milo, je ne connais plus de limites ! Par...pardon ! »

Maintenant, il allait falloir créer quelque chose pour que Shad ne lui pose pas de questions sur les bourdes qu'ils avaient pu sortir, tout le deux. Les fois où ils avaient dit que les Princes n'étaient pas les leur, par exemple, ou quelques petits détails comme ceux-là. Si seulement sa cervelle était en état de raisonner, il pourrait mentir, voire imaginer un stratagème pour sortir de ce plan foireux, cependant, là, la seule chose qu'il pouvait imaginer, c'était carrément embrasser les chaussures de son bourreau pour pouvoir sortir de cet endroit, et si il le devait vraiment, se faire embaucher dans la garde.

« Je peux..je peux rejoindre votre camp ! Pitié, pitié ! Me...me frappez pas ! »

Invité

La cellule n’était pas si ordinaire… Elle n’était ni nue ni dépouillée de meubles, au contraire… comment expliquer ? Shad avait eu autrefois la stupidité de croire que son prince était fait en sucre et avait donc aménagé une pièce à priori plus ou moins douillette pour lui et ses instants de torture, or Shad s’était trompé. Armand n’était pas fait en sucre, c’était un adolescent plein d’assurance et qui n’avait pas besoin d’un tel confort inutile pendant qu’il jouait, s’amusait et faisait régner sa justice, si parfaite… Comme lui et son frère Louis. D’ailleurs ce dernier, Shad ne l’avait pas vu depuis hier matin, ce qui était étrange. Effectivement ne faisait-on pas appel souvent à lui ? Il irait voir à nouveau ses Princes, pour s’assurer que tout était en ordre.

Inutile, cette pièce avait été laissée, abandonnée. On pouvait notamment le remarquer par la pesanteur de l’air, ou encore la difficulté par moment du feu à rester animer ou encore à évacuer sa fumée. Il fallait qu’il fasse attention de ne pas s’évanouir stupidement à cause d’une ridicule asphyxie causée par cette odeur âcre qui prenait forme sous forme de nuage noir menaçant.

Shad s’éloigna de Denzel et versa le reste du vin dans un verre qu’il avala à petites gorgées, ignorant royalement les supplications et les excuses de sa victime. Il avait encore tant à faire et il avait tant autour de lui… il avait tant de choix qu’il ne savait que choisir. Il était si indécis sur la façon de détruire toute la personnalité du jeune homme, pourtant ce n’était pas bien compliqué. On résistait rarement à un tel régime plusieurs mois car oui Shad comptait le garder comme un mois avec une visite de sa personne une fois voire deux fois par semaine. Il était décidé à l’assujettir à sa volonté. D’ailleurs … la technique du clown était pitoyable. Lui permettre de faire partie du camp et puis quoi encore ? Le ténébreux n’allait pas trahir ses maîtres en introduisant un serpent dans leurs rangs… sauf si Denzel devenait un docile chiot, qui obéira à Shad qui obéit donc aux Princes. La chaîne est parfaite … si seulement il y arrivait. A cette condition seulement ce clown pourra se montrer utile.

- Ton jumeau mérite également ce que je compte te faire subir. Il m’a insulté comme toi, m’a attaqué comme toi et surtout … il a blasphémé nos souverains. Dis-moi … comment te sentirais-tu si ton jumeau se faisait torturer, sous tes yeux, pieds et poings liés, impuissants… et inversement, que ressentirait-il lui ? Mais ne vous inquiétez pas, vous continuerez à vous ressembler comme deux gouttes d’eau car je prendrais la peine d’infliger la même chose à lui ce que je fais à toi. Je suis un homme bon n’est-ce-pas ?

Ironie. Il jubilait à l’idée de voir le visage apeuré, haineux, de ce couard ! Il ne méritait que la torture, la pendaison mais… il semblait connaître certaines choses, par conséquent il fallait le ramener dans un état totalement inoffensif et obéissant. Le frère aiderait sûrement malheureusement il n’avait pas pu mettre la main sur les deux en même temps. Les deux frères se défendaient si bien ensemble.

Il prit les mains du jeune homme et jeta un coup d’œil critique pour finalement secouer la tête. Shad alla à nouveau dans son petit atelier si complet et prit un couteau simple mais avec une lame extrêmement affuté. Il se mit auprès du jeune homme et promena l’objet sur tout corps.

- En Asie, on épluchait le corps des prisonniers. Quelques fois on coupait la taille grâce à une belle hache. En Occident, on utilise des procédés comme la dislocation de membres ou encore le fouet ou encore la privation du sexe. J’hésite quelle nation et quelle méthode choisir … à ton avis ? Pense à ton frère et choisit le moins pire, sachant que le moins pire est long, alors que le plus pire est rapide… dans tous les cas, la douleur sera présente. Alors, comment dois-je te cuisiner ?

Il riait comme un dément. Pense à ton cher frère qui allait bien se démener pour venir te sauver ? Qu’il vienne avec ses secours, Shad avait déjà fait passer le mot aux gardes et domestiques les plus fidèles. On surveillait étroitement la moindre arrivée suspecte… Qu’il vienne pour tomber droit dans un piège et ainsi avoir droit à plusieurs sources d’informations pour mettre fin à ces mouvements de rébellions qui gênaient tant ses Princes dans leur règne.

- Réfléchit aux différentes tortures et je verrais si je te l’accorde ou non. Pendant ce temps je vais manger. Quant aux instruments, je pense pouvoir me débrouiller, donc ne t’inquiètes pas.

Et il s’assit pour déguster soigneusement à tous ces plats. Il allait avoir faim alors autant prévenir cette appétit en mangeant maintenant plutôt qu’après où il risquait d’être couvert de sang.

Hs: O/ un nouveau ava'... ca change de d'habitude.

Pitié, pas Milo. Tout, sauf menacer Milo. Son frère respirait tellement la joie de vivre et il était tellement adoré par le brun que le menacer le rendait potentiellement dangereux. Le pire, c'était qu'écoutant ses paroles, Denzel ne pouvait cesser de s'imaginer la silhouette de Milo, prostré de douleur, regrettant amèrement d'avoir tenté de le délivrer. Il voyait Shad lui donner des coups de pied, le marquer au fer rouge, lui faire subir autant de châtiments que possible. Il avait peur. Il regrettait d'avoir maltraité par moments Milo dans le passé, de l'avoir purement et simplement pris pour un idiot lorsque celui-ci obéissait un peu trop à son instinct. Par pitié, faites que Milo n'entre jamais dans l'enceinte de la prison ; des masses de garde connaissaient sûrement son signalement – un garçon aux cheveux longs et blonds, c'est vraiment facile à choper – par pitié, juste par pitié.

D'affreuses larmes salies par le maquillage mis à outrance sur son visage lui piquaient les yeux. Il tentait de se recroqueviller sur lui même, même si cette position qui aurait pu faire qu'il se soit senti en sécurité ne faisait en réalité rien du tout de cela. Les larmes dégoulinaient de plus en plus sur son visage, tandis qu'il écoutait Shad lui proposer cet affreux dilemme. Non, plus jamais, il ne voulait pas avoir mal, il ne voulait pas que son frère ait mal. À nouveau, l'imagination étant une force bien plus grande que vous ne pourriez le croire, il imaginait Shad se penchant sur lui, Shad prendre des pincettes chaudes, lui soulever la peau, le faire saigner, à nouveau, lui déchirer les oreilles, lui retourner les ongles. Et si maintenant, tout de suite, il se mordait la langue ? Il se souvenait des maîtres d'armes, dans l'autre royaume ; ceux-ci leur disaient qu'ils devaient être de parfaits espions, qu'il fallait assumer son rôle jusqu'au bout. Parmi les choses qu'il y avait à faire lorsqu'ils étaient emprisonné, il y avait le suicide. Chaque espion gardait soigneusement caché sur lui un petit poignard, mais Denzel avait bien cherché, on l'avait fouillé et il lui avait été subtilisé. Rien que pour cela, il haïssait ces immondes connards qui lui avait pris son jouet. Ensuite, il y avait bien entendu la technique du fameux poison foudroyant caché dans une dent en plastique, mais Denzel n'avait jamais tenu à se faire remplacer une dent, ce n'était pas dans ses principes : on ne sait jamais, celle-ci peut péter et le poison le tuer par erreur...La dernière méthode restait de se couper la langue d'un grand coup de dent après avoir tenté une dernière fois de tuer son adversaire.

Milo...Milo...

« Milo... »

Il allait le regretter. Milo allait pleurer, sans lui mais il ne pouvait supporter cela. Mourir d'une hémorragie ou s'étouffer avec sa langue en l'avalant était un programme moins douloureux que tout ce que Shad lui avait proposé.

« J'ai choisi... »

Son regard fouilla tout ce qui pouvait se trouver sur le sol. Pour le moment, ses yeux contusionnés ne voyaient rien à part de la poussière, mais qui sait...Oh, à deux centimètres de lui, le bouchon de la bouteille reposait. Si seulement il pouvait l'attraper ; Denzel était pratiquement à bout de forces, mais entre ses mains, un vulgaire bouchon pourrait filer se transformer en arme très efficace. Finalement, il renonça à attraper cet objet des plus inutiles ; Shad aurait réussi plus tôt et lui aurait été moins efficace qu'avec le simple plat de sa main. Ses poignets étaient toujours alourdis par les chaînes, mais en économisant ses mouvements au maximum et en faisant abstraction de la douleur, il devrait y arriver...normalement.

Il fit alors mine de se relever, puis, d'un seul coup, profitant de ses dernières forces, fonça sur Shad comme un fou furieux, renversant la table et le dîner au passage. Le garçon lança sa main un grand coup vers le cou de Shad, puis, très rapidement, ouvrit grand sa bouche pour en sortir sa langue. Il l'étira un maximum, dans l'optique évidente de refermer sa mâchoire.

On se retrouvera un autre jour, Milo.

Invité

Shad crut voir un enfant sale, un enfant du bas peuple et non un jeune homme de plusieurs années qui savait se battre. Il se recroquevillait, comme si ca allait le sauver, le protéger de futurs coups ou tortures. Quel enfant naïf et arrogant ! Quel homme puéril et enfantin ! Shad aurait presque envie de vomir ce qu’il mangeait mais il ne fit rien, il goûta calmement à son plat –une blanquette de veau- si divinement préparé par le chef de cuisine et son stupide assistant, Vidal. Il mâcha lentement comme si chaque bouchée comptait, comme s’il n’allait plus manger alors qu’au contraire il continuera à vivre dans ce luxe et cette abondance. C’était seulement son caractère… Ne jamais se précipiter, tout faire calmement.
Il détourna même les yeux lorsque sa victime se noyait dans son hideux maquillage, qui dévoilait petit à petit le teint de peau… quoique ce dernier vire dans le grisé avec la poussière, la saleté et bien évidemment ces produits cosmétiques. Décidément, d’où lui venait cette manie de se maquiller si abondamment ? Une légère touche était nettement plus élégante et plus agréable à voir… d’ailleurs, Shad devrait sincèrement penser à son bleu. Il était devenu la risée du monde certes, mais il ne pouvait pas continuer à se trimballer avec. Il pourrait chaque jour recouvrir un peu plus cette ecchymose, laissant ainsi croire qu’elle disparaissait vite alors qu’au contraire la couleur se fonçait et ressortait clairement sur son teint de porcelaine.

Shad s’arrêta de manger. Il entendit un mot, ou plutôt un prénom, Milo – soit celui du frère – mais également la phrase tant attendue du majordome « J’ai fait mon choix ». Il posa ses couverts autour de son assiette et attendit donc la suite avec impatiente, mâchant encore quelques bouchées de sa viande et fixant l’être qui se trouvait à ses pieds, qui se relevait maintenant.
Puis ce fut un véritable flash, un choc qui lui meurtrissait tout son être, privant ses muscles de l’air distribué par ses poumons… Quelque chose l’avait touché au cou et il recracha indélicatement tout ce qu’il avait en bouche au risque de s’étouffer, et s’étaler presque à terre. Il toussa et avait une affreuse envie de vomir. Sa tête lui tournait et il ne remarqua pas la tentative désespérée de Denzel qui est l’étouffement avec la langue.

Inconsciemment le majordome aggripa le haut du jeune homme et l’obligea violemment à s’aplatir à terre, être encore plus inférieur à Shad, et là il l’assomma tout bonnement. Le majordome s’étala à terre, à court de souffle pour s’assoupir, le temps de retrouver une respiration normale et non sifflante et douloureuse.
Une bonne heure peut-être bien, il recouvrit ses esprits et toujours chancelant, il se dirigea à la porte et ordonna d’une voix rauque aux gardiens d’attacher le gamin sur un mur ou sur un lieu où il ne risque pas de bouger… En aucun cas le ligoter comme une momie ! Ils obéirent, sans commentaire sur l’état du majordome. Ce dernier tenta de retrouver une apparence normale en arrangeant ses cheveux, époussetant son costume et buvant un peu de vin pour se revigorer. Mauvaise action car il avait encore assez mal dans cette zone.

Maintenant il comprenait d’où lui venait cette haine des tortures !

Denzel se réveillait enfin. Shad s’en approcha, la mine des plus sombres, avec un couteau coupant en main. Finalement le clown se retrouvait avec des chaines aux pieds et aux mains situées sur le mur. Il ne risquait pas de faire un faux mouvement cette fois-ci. Lentement il enleva les chaussures de Denzel, approcha le couteau de la peau et commença à la peller, avec des gestes précis et absolument lente, comme pour faire durer cette agonie.
Tout en chantonnant, il pela donc plusieurs couches de peau sur une grande zone sur les deux pieds. C’était son tout premier châtiment … avec ça, il ne risquait pas de fuir de si tôt à moins qu’on veuille bien ralentir et le porter.

- C’est l’une des premières choses que ton frère aura droit Denzel, sauf qu’avec lui je ferais deux fois plus. En guise de remerciement pour tout à l’heure.

Sa voix gardait encore des intonations trop graves mais il se reprenait, petit à petit. Il avait également mis un bâtonnet dans la bouche de ce clown, histoire qu'il ne se morde pas par erreur la langue. Il ne fallait pas qu'il meure maintenant.

Où...était-il ? Denzel cligna une fois des yeux. Où ? Il y avait cette vague douleur en son corps qui semblait s'intensifier au fur et à mesure qu'il se réveillait. Il avait diablement l'impression qu'il n'arriverait jamais à l'étendre ? Pourquoi ? Le jeune garçon essaya de bouger ses membres mais ceux-ci, durs comme fer, ne firent pas un seul mouvement. Où était-il ? Autour de lui, seule la couleur noire. Alors, c'était cela, être mort ? Que s'était-il passé ? Il se souvenait de Milo, et se souvenait du courage un peu désespéré qu'il avait eu en sautant sur Shad alors qu'il était déjà gravement mal en point. Il avait alors tenté de se mordre la langue, en un geste désespéré. Était-ce cela, l'au-delà ? Devait-il attendre d'être jugé par il ne savait qui avant de pouvoir de nouveau se mouvoir ? Le brun avait envie de pleurer ; Milo, Milo, ce qu'il allait regretter le blond et leurs chamailleries ! Leurs jeux d'enfants, leurs bêtises, leurs insultes à Meghan ! Pourquoi ce plan s'était-il donc déroulé comme cela.

Denzel ouvrit soudainement les yeux. Il sentait quelque chose dans sa bouche. Il n'était mort, et pire, il ne pouvait pas bouger. En face de lui, Shad, un peu moins propre qu'à l'accoutumée l'observait, un éclat de haine malveillante dans les yeux. Une douleur brute acheva de le réveiller. Shad écorcha soudainement ses pieds et Denzel cria. Il hurla autant que son âme le lui permettait, et de ce fait, le bâtonnet tomba par terre. Mais quand, quand ce petit manège infâme allait-il se terminer ? Denzel ne pensait plus du tout à mourir. Il voulait vivre, c'était tout. Vivre auprès de Milo et ne pas s'écrouler tout d'un coup car il était tellement faible, sans lui. Cette première torture dura un temps que l'espion n'osa pas comptabiliser : pour lui, ce fut tout simplement une éternité de douleur, durant laquelle on lui arracha ses pieds.

Puis, il releva la tête vers Shad, exténué, en larmes, crissant les dents de douleur. Il ne voulait pas que Milo souffre, le meilleur moyen était qu'a priori, Shad ne le trouve pas. Denzel croyait. Il savait que son frère ne se ferait pas avoir, qu'il demanderait de l'aide à plus fort que lui et qu'en aucun cas il ne viendrait seul dans un lieu qu'il ne connaissait pas. Milo était comme ça, il avait tendance à agir un peu trop rapidement, mais ne faisait pas n'importe quoi non plus. Alors la menace de Shad ne prenait pas. Jamais son frère ne tomberait entre ses griffes.

« Pi..tié ! Ha...Rebellion ! Han ! Vous dire...han...royaume..à côté ! »

Le pauvre garçon était en sang et en larmes. La douleur des coups qu'il avait précédemment reçus était insupportable, de même que celle de ses pieds écorchés vifs. Il pencha sa tête sur le côté, afin de pleurer un peu, essayant de ne pas montrer à son bourreau sa souffrance. Les garçons ne pleurent pas, les garçons doivent rester fiers. Et comment un homme pouvait-il être aussi cruel ? Était-ce le diable en personne ? Les Princes de ce royaume avaient-ils orchestrés un contrat avec un démon, pour bénéficier d'un majordome aussi...imbattable dans bien des domaines ? Au fond, il ne voulait pas le savoir, cela lui était bien égal et puis lui aurait fait encore plus peur.

S'enfuir. Pourvu que...bientôt. Il devait garder espoir. Et que Shad reparte rapidement, heureux de ces nouvelles informations de qualité.

Invité

Comme il s’y attendait un cri déchira ce silence. Un cri strident qui rendrait sourd n’importe qui, sauf que le bourreau – qui n’était personne d’autre que Shad – s’en fichait. Au contraire il se délectait de ce son, comparable à une douce mélodie à ses oreilles. Etait-ce un démon ? Peut-être bien que oui. En tout cas il abandonnait sa cape du gentil domestique dès l’instant où on portait préjudice à sa personne, atteinte à son corps !
Sa si précieuse chaire qu’il entretenait depuis vingt-cinq ans avec grand soin à coup d’huiles et d’exercices. Il se devait d’être beau, de ne pas être une tâche auprès de ses Princes bien-aimés. Malheureusement… son idéal, sa beauté venait d’être « détruite » avec ce bleu et maintenant une zone rougeâtre qui s’étendait au niveau du cou.

Honte ! Abomination !

Il détruirait toute la fierté de ce clown qui a osé porter une main sur lui … Vous avez la parole de Shad.

ET puis cet idiot se révélait faible, augmentant par conséquent la colère de Shad. En effet c’était cet être faible et geignard qui l’avait réduit à cet état de loque, d’homme battu ! S’il s’était montré plus dur, plus résistant, peut-être que le ténébreux aurait été plus généreux et moins violent. Mais Que nenni !

Malgré tout et à contre cœur, il arrêta. Avant tout ses princes et donc les informations de ce geignard, et après seulement il en finirait pour de bon, en souillant et cassant toute l’humanité dont ce clown disposait. C’était devenu à cet instant son but ultime : réduire à néant la vie d’une personne, non son existence toute entière. Qu’il regrette d’être né, qu’il regrette d’être si mal loti, qu’il regrette chacune de ses respirations !

Même s’il donnait des informations fortes utiles, il n’échappait pas à son funeste destin ou plutôt à sa tragique fin. Ainsi le royaume voisin envoyait des espions. Oui, car autrement que ferait une histoire de royaume voisin.

- Parle donc ou tu subiras bien pire.

Il mentait Shad mais il parlait si gentiment, avec une si belle voix qu’on avait l’impression qu’il avait pardonné. Pourtant il allait continuer une fois que cet idiot aura tout dit et s’il avait menti et bien il réparerait sa faute en ressentant à nouveau clairement la douleur. Une douleur plus grande que la précédente.

- Par contre, ose me mentir et je peux t’assurer que tu le regretteras toute ta vie mon petit clown.

ET après, le majordome en fera son esclave au point que Denzel s’agenouillerait et obéira docilement et même avec en train à ses ordres. Il fera un bon chien, un excellent animal domestique… Pour l’instant ce n’était qu’une bête sauvage à dresser, encore inconscient du monde qui l’entoure et qui ne mesure pas la conséquence de ses actes.

Il allait être amusant… très même ! Shad en jubilait d’avance. Cela faisait trop longtemps qu’il n’avait pas torturé ou imposer sa supériorité de cette manière, c’est-à-dire avec une brutalité franche. Jusqu’à maintenant c’était à coup de quelques plaisirs charnels ou encore de belles phrases bien tournées pour la noblesse mais rarement le contraire. Là il était plus ou moins franc et il pouvait se déchainer. Quelle libération !

Les larmes continuaient de couler sur les joues de Denzel. Même si son tortionnaire avait momentanément arrêté de le torturer, la douleur restait, exponentielle. Il se mordait les lèvres, ne supportant pas cette douleur, et se raccrochant à la silhouette de Milo comme raison de vivre. Il allait le délivrer, hein ? Qu'il ne soit pas obligé d'obéir à tous les ordres de cet homme, par peur qu'il le punisse un peu plus ! Par pitié ! Il avait tellement mal que son désir le plus cher était qu'il cesse : qu'il le délivre une fois pour toute, peu importe si il devait trahir tous ceux qu'il connaissait. Il ferait juste attention à ne pas trahir son frère, et à ne jamais le laisser tomber entre les mains du Monstre afin qu'il ne subisse pas le même sort que lui... Ses yeux étaient le miroir de son âme, montrant à Shad à quel point il pouvait être terrifié par sa personne. C'était gagné, monsieur ! Ce petit jeune homme assez fier, et bien il vous appartenait désormais ! Vous feriez peut-être mieux de vous méfier de ce loup, car il risquerait de vous attaquer et tuer dès que vous aurez le dos tourné, mais tant que vous auriez un œil dessus, il accomplirait fidèlement et loyalement son travail. Il faudrait juste lui rappeler de temps en temps à qui il appartenait, ou le souvenir de la douleur commencerait à s'estomper et l'enfant fuir loin de celui qui lui avait enseigné toutes ces choses.

« C'est...c'est un complot de Sire...Sire Paulin ! Royaume voisin ! Il nous a envoyés....un petit groupe d'espions, nous, son armée rapprochée, principalement des criminels ou des personnes qui auraient déjà dû mourir pour...pour enquêter sur votre royaume ! Mais pitié ! Je ne sais rien d'autre ! Il n'y a que notre chef qui c'est ce que Paulin veut véritablement ! Nous n'avons pour l'instant pas reçu d'autres ordres ! »

S'il l'avait pu, il se serait probablement accroché à la main, au pied, ou encore à la jambe de Shad. Il était attaché, c'était un fait ; mais il continuait de pleurer comme jamais il ne l'avait fait auparavant... Il avait trahi, c'était comme cela : Milo ne serait pas fier de lui et si jamais il revoyait un jour les autres, il se demandait comment il allait faire. Probablement qu'il baisserait la tête et leur mentirait à tous, pour ensuite rejoindre Shad au château et le faire procéder à l'arrestation de toute la troupe. Il en était triste mais à vrai dire, à part Milo, il n'était attaché à personne là-bas...Donc il fallait à tout prix qu'il réussisse à séparer Milo du reste, ou bien Shad laisserait éclater sa colère envers sa personne...ou bien il jurerait. Il jurerait au majordome qu'il ferait tout ce qu'il voudra, qu'il les lui livrerait sur un plateau pourvu qu'il épargne son frère jumeau !

« Shad von Kaizel ! Par pitié ! J'ai du talent ! Je peux être un fabuleux espion, à votre service ! Si...si vous épargnez Milo, je vous promets de vous obéir à tout jamais et de faire déjouer toutes les complots qui traînent autour des Princes ! Et cela incluse autant les résistants que Perceval et Paulin ! Je vous les livrerai sur un plateau ! »

Il avait cessé de sangloter, supportant bravement la douleur. C'était fini le Denzel qui était faible devant Shad : celui-là prendrait des initiatives et sauverait son frère. Il avait toujours mal, ne vous y trompez pas, et si toutefois Shad avait enlevé les liens qui le retenait captif, il se serait brusquement effondré sur le sol. Si plus, ni moins.

« Ca... Vous suffit ? »